Point sur les principales mesures contenues dans la loi Lagarde

La loi Lagarde du 1er juillet 2010 fera date dans l’histoire du crédit à la consommation en France.

En effet, pour la première fois depuis plus de trente ans, une réforme du crédit à la consommation s’attaque aux principales causes du surendettement (alors que les lois précédentes se contentaient en général d’en traiter les conséquences les plus visibles).

Les causes du surendettement sont nombreuses et certaines d’entre elles trouvent leur origine dans ce qu’on appelle désormais couramment le « malendettement ». Certains établissements de crédit ont, en effet, axé leur stratégie sur l’exploitation des nombreuses perversions présentes dans le mode de fonctionnement des crédits renouvelables, et ces derniers sont ainsi devenus peu à peu des produits hautement toxiques.

Dans le même temps, l’évolution contrastée des taux d’usure applicables aux crédits renouvelables et aux prêts personnels (hausse continue du premier, quand le second baissait de manière inexorable) a eu une conséquence indésirable qui a fortement fragilisé la solvabilité de millions de ménages. Compte tenu du niveau actuel du taux d’usure applicable aux prêts personnels (8 %), une partie toujours plus importante de la population n’y a plus accès, pour des raisons de niveau de solvabilité « trop juste » aux yeux des établissements prêteurs. Explication : plus l’emprunteur potentiel est estimé « à risque », plus il doit (pour l’établissement de crédit) payer cher son taux d’intérêt. Et voilà la grande bizarrerie du système : alors même que ces familles les moins fortunées auraient bien besoin des prêts personnels, moins chers et moins dangereux, elles sont systématiquement dirigées vers les crédits renouvelables.

Ces consommateurs « laissés pour compte » viennent grossir chaque année les rangs des familles surendettées, de plus en plus nombreuses à déposer un dossier auprès des commissions de surendettement de la Banque de France

Mais il ne s’agit là que du surendettement officiel. L’officieux, pouvant être assimilé à « l’antichambre du surendettement », concerne lui aussi, chaque année, de plus en plus de consommateurs.

Les causes du surendettement que la loi Lagarde souhaite combattre sont les suivantes :

· Le mode de détermination actuel des taux d’usure est absurde ;
· Les crédits renouvelables ne se remboursent plus ;
· Les cartes de fidélité / paiement font plonger certains consommateurs dans le crédit ‘à l’insu de leur plein gré’ ;
· Les propositions de financement de biens sont trop systématiquement faites en crédit renouvelable ;
· Les publicités pour les crédits renouvelables sont trop souvent trompeuses ;
· Les consommateurs titulaires d’un crédit renouvelable ne sont pas toujours conscients de l’étendue de leur engagement ;
· Les crédits renouvelables sont automatiquement reconduits année après année, sans que la solvabilité de leur titulaire ne soit jamais vérifiée ;
· Certains organismes sont prêts à tout (certains vont même jusqu’à offrir des cadeaux !), pour recruter de nouveaux clients en crédit renouvelable ;
· L’utilisation d’un fichier qui recense les incidents de paiement caractérisés (fichier négatif), ne permet pas de mettre un frein à la frénésie de crédit dont font preuve certains consommateurs

Après de très nombreuses concertations, et après avoir été fortement améliorée par le Sénat et l’Assemblée nationale, la loi Lagarde a été définitivement adoptée le 21 juin 2010, puis promulguée le 1er juillet 2010 au journal officiel. Cette loi comprend des mesures devant théoriquement s’attaquer à l’ensemble des causes décrites ci-dessus.

Malheureusement, sa mise en œuvre nécessite l’écriture de 18 décrets d’application ou arrêtés, et la rédaction de certains d’entre eux, visiblement fortement influencée par les lobbyistes du crédit renouvelable, a fortement réduit la portée des principales mesures contenues dans la loi.

· Le décret d’application définissant la durée maximale de remboursement est ainsi en totale contradiction avec les engagements pris par Mme la Ministre et M. le Rapporteur de la commission des affaires économiques de l’Assemblée, engagements sur la base desquels la loi a pourtant été votée en termes identiques par l’Assemblée et le Sénat.
· L’arrêté fixant les nouvelles modalités de détermination des taux d’usure prévoit une période de transition de deux ans, applicable aux anciens comme aux nouveaux contrats de crédit, et commençant par un trimestre au cours duquel rien ne change ! Le report de cette mesure pourtant considérée comme étant de salubrité publique vient de plus s’ajouter aux trois trimestres que les députés avaient déjà accordé aux établissements de crédit pour s’adapter au changement (la protection du compte de résultats de certains lobbyistes l’a donc largement emporté sur l’indispensable protection des consommateurs).
· Le décret d’application définissant l’exemple représentatif du remboursement devant figurer dans toute publicité pour un crédit renouvelable est tellement mal écrit qu’aujourd’hui la situation est pire qu’avant l’introduction de cette nouvelle notion. Il est en effet très facile de tromper le plus légalement du monde ses futurs clients, « grâce » à une construction cynique de ses barèmes de remboursement autour des valeurs devant figurer dans cet exemple soi-disant représentatif.
· Enfin, la notion de prêt personnel alternatif à tout financement en crédit renouvelable d’un bien d’un montant supérieur à 1 000 € n’est définie ni dans le texte de loi, ni dans ses décrets d’application : il y a donc de fortes chances que cette nouvelle obligation soit inefficace, au moins dans un premier temps.

Malgré ses imperfections, la loi Lagarde représente tout de même un énorme progrès. En effet, les nouvelles obligations prévues dans ce texte sont désormais inscrites dans le marbre du code de la consommation.

Il suffit donc, si l’on souhaite les rendre efficaces, corriger certains décrets d’application.

Or, ce second temps peut survenir rapidement, car il est plus rapide de modifier un décret que de modifier un texte de loi ; pour cela, il suffit de prendre conscience de l’énormité de certains « tripatouillages » (ou de constater que le surendettement continue son inexorable progression).

A propos de Denis Cotte Conseil :

Denis Cotte Conseil est un cabinet de conseil dirigé par Denis Cotte, spécialiste du crédit et consultant en la matière auprès de grands établissements financiers. Denis Cotte Conseil informe et conseille les consommateurs sur les aspects positifs, mais aussi sur les dangers que peuvent présenter certains crédits à la consommation, notamment les « revolving ».
Pour plus d’information : www.moncreditpropre.com

Source : Agence Fargo

Publié le 15 avril 2011
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